LOUDNESS – Devil Soldier (1982)

Après le single « Burning Love/Bad News », Loudness publie un deuxième album au son un peu plus clair et à l’orientation musicale légèrement différente. En effet, si les influences sont toujours multiples, elles se fondent un peu mieux dans ce heavy enlevé, mélodique et technique. Dès « Lonely Player », les arrangements vocaux sont plus travaillés et la voix de Minoru sonne plus juste. La cohésion du groupe est toujours présente et permet de poser de belles mélodies sur une assise solide. Evidemment, le japonais peut rebuter certaines personnes, mais le titre s’inscrit dans l’air du temps, avec son heavy puissant, enlevé et percutant. Inspiré par Budgie, « Angel Dust » fait le pont entre l’Orient et l’Occident, en proposant un hard rock au riff assez classique, mais efficace. On sent que le groupe cherche à se faire plus accessible et y parvient. C’est aussi le cas avec « Rock the Nation », aux ambiances très seventies, qui donne envie de taper du pied ou « Loving Maid » aux tonalités proches des premiers albums de Scorpions, en plus sombre, et qui voit le groupe épurer son style tout en conservant ses changements de rythmes.

Malgré cette ouverture, Loudness nous offre aussi des titres plus complexes, comme l’étonnant « Girl » aux touches jazz, qui n’est pas sans rappeler leurs compatriotes de Bow Wow ou le torturé « Hard Workin’ » qui évoque l’album précédent avec son mélange des genres. A chaque fois, Akira se fend de solos inspirés qui font de lui un guitar hero au style assez singulier, mais qui apporte une vraie fraîcheur dans le milieu. Plus heavy « Devil Soldier » clôt l’album sur des cavalcades maîtrisées qui offrent une alternative à la scène britannique dominante de l’époque. Les guitares s’y montrent limpides et particulièrement savoureuses. Et même si Loudness s’essaie à la ballade, avec « After Illusion », il demeure néanmoins un vrai groupe de heavy metal déjà capable d’enflammer les foules. Comme son prédécesseur, Devil Soldier trouve son public, pourtant, l’explosion ne viendra qu’avec l’album suivant.

  • 1. Lonely Player 
  • 2. Angel Dust 
  • 3. After Illusion 
  • 4. Girl 
  • 5. Hard Workin’ 
  • 6. Loving Maid 
  • 7. Rock the Nation 
  • 8. Devil Soldier
  • Minoru Niihara – Chant
  • Akira Takasaki – Guitares 
  • Masayoshi Yamashita – Basse 
  • Munetaka Higuchi – Batterie

Label : Nippon Columbia

CHASTAIN – Mystery Of Illusion (1985)

En ce milieu des années 1980, Mike Varney déniche et produit les guitaristes les plus rapides et novateurs de la planète metal (Yngwie Malmsteen, Tony McAlpine, Jason Becker, Marty Friedman, Vinnie Moore…). Il était donc assez évident qu’il donne sa chance à David T. Chastain même si, rapidement, les amateurs comprendront que ce dernier est moins influencé par la musique classique que par le jazz fusion. Ainsi, dès ce premier album, son groupe nous livre des morceaux torturés qui tranchent avec les productions habituelles de l’époque et du label Shrapnel. Pour s’en convaincre, il suffit de jeter une oreille sur « Mystery of Illusion » au riff hypnotique, qui développe des breaks étranges, nourri au jazz, et sur lequel, la voix de Leather Leone semble vouloir nous déchirer les oreilles.

Le groupe explore de nombreux thèmes du metal, notamment le speed avec le furieux « I’ve Seen Tomorrow » au riff, aux harmonies et aux solos à faire pâlir la plupart des guitaristes. Cela déboule à deux cents à l’heure, soutenu par la batterie de Fred Coury (futur London, Cinderella et Ozzy Osbourne) et la basse toujours impeccable de Mike Skimmerhorn. Les morceaux sont épais, agressifs : « When the Battle’s Over », et laissent peu de place aux mélodies sucrées, tant Leather hurle : « I Fear No Evil ». Cela tranche avec les solos souvent très clairs et d’une étonnante fluidité. Les fans découvrent alors un guitariste hyper doué, capable de descentes de manche ahurissantes. Cette impression se confirme sur les cavalcades de « We Shall Overcome » qui s’inscrivent dans un esprit proche d’Iron Maiden, avec une réelle volonté de surprendre, notamment grâce aux solos. Ces influences anglaises se retrouvent également dans l’introduction de « The Winds Of Change », aux sonorités orientales.

Chastain propose aussi des chansons plus lentes, comme la pesante « Night of the Gods », assez dispensable d’ailleurs, ou la ballade « Endlessly », seul moment de calme dans cet univers surchargé de notes et de hurlements. Le groupe fait alors preuve d’un étonnant feeling, que l’on retrouve sur « The Winds Of Change », dans un genre très différent. Pour un premier album, Chastain s’en tire plutôt honnêtement, même si on peut se demander quelle mouche a pu piquer leur maison de disque pour mettre « Black Knight » au début de l’album. Apparemment, ce titre plaît davantage aux Américains qu’aux Européens.

Cet album propose une belle entrée en matière dans l’univers de Chastain, grâce à des titres variés et une approche toute personnelle du metal.

  • 1. Black Knight
  • 2. When the Battle’s Over
  • 3. Mystery of Illusion
  • 4. I’ve Seen Tomorrow
  • 5. Endlessly
  • 6. I Fear No Evil
  • 7. Night of the Gods
  • 8. We Shall Overcome
  • 9. The Winds of Change
  • Leather Leone – chant
  • David T. Chastain – guitares
  • Mike Skimmerhorn – basse
  • Fred Coury – batterie

Producteur : Mike Varney

Label : Shrapnel

H-BOMB – Coup de Métal (1983)

Formé en 1982 par Fermando Fereirra et Philippe Garcia dans l’Essonne, H-Bomb publie son premier album six titres l’année suivante sur le label hollandais Rave-On records. Précurseur du speed metal en France, le quintet livre un condensé de fureur et d’énergie, porté par des paroles guerrières, pas toujours originales, mais qui cherchent à faire sonner notre langue. La voix de Didier Izard, aigue et puissante, porte ces compositions taillées pour la scène. Les riffs sont acérés, la section rythmique efficace, donnant à l’ensemble une folie communicative qui fait de ce groupe l’un des fers de lance du genre en Europe.

Le premier morceau donne d’ailleurs le ton, avec son rythme endiable, son thème lié au patronyme du groupe et ses riffs destructeurs. « H-Bomb » est une excellente entrée en matière qui sert d’hymne fédérateur. Plus subtil, « Dans les griffes d’Attila » développe une thématique historique en s’appuyant sur des riffs mélodiques. Le groupe se montre plus fin que certains pourraient le penser. On perçoit l’influence de Judas Priest, notamment dans le morceau « Chasseur de frime » qui voit les guitaristes se livrer à de beaux duels. La production, qui manque un peu de dynamisme, ne rend pas vraiment hommage aux différentes accélérations, meme si elle est bien meilleure que beaucoup d’autres de cette époque.

La seconde face débute par « Le Loup », un titre énorme, au refrain qui reste longtemps dans la tête. Une nouvelle fois, les riffs sont acérés et possède un certain groove que met en avant un rythme saccadé et entraînant. Gerard Michel y abat un travail colossal, tandis que les guitaristes montrent de la finesse lors d’un break permettant une respiration bienvenue. Ce n’est pas de refus, car H-Bomb ne relâche jamais le rythme. « Condamne à mort » déboule comme un mort de faim, dévastant tout sur son passage. La section rythmique et les riffs sont énormes, même si les lignes de chant sont plus attendues que sur les titres précédents. L’influence de Judas Priest est perceptible, même si le groupe ne se limite pas à un unique rythme et alterne riffs plaqués et d’autres moins simples. Si les guitaristes ne sont pas de grands techniciens, ils nous assènent des parties efficaces. C’est d’ailleurs ce qui évident sur « Coup de métal », aux nombreuses nuances, qui mêle motifs issus du metal et d’autres plus hard rock, donnant à l’ensemble un côté groovy vraiment sympathique.

Devenu culte parmi les amateurs de metal français, Coup de Métal est une belle entrée en matière avant le très bon Attaque.

  • 1. H-Bomb
  • 2. Dans les griffes d’Attila
  • 3. Chasseur de frime
  • 4. Le Loup
  • 5. Condamne à mort
  • 6. Coup de métal
  • Didier Izard – Chant
  • Christian Martin – Guitares  
  • Armando Ferreira – Guitares  
  • Philippe Garcia – Basse
  • Gerard Michel – Batterie

Label : Rave-On Records

DEMON – Night Of The Demon (1981)

Formé en 1979 à Leek, en Angleterre, par le chanteur Dave Hill et le guitariste Mal Spooner, Demon est un groupe de la New Wave Of British Heavy Metal qui commence par surfer sur la vague occulte avant de changer ses thématiques. Après un premier « Liar »/« Wild Woman » en 1981, le groupe nous livre cet album l’année suivante. Sous une pochette horrifique du plus bel effet, Night Of The Demon accueille dix compositions léchées, inspirées par la musique des années 1970 et le shock rock. Le chant de Dave Hill, mélodique et charismatique, attire immédiatement l’attention, tandis que les arrangements de guitares, léchés et subtils, entraînent l’auditeur dans un univers coloré, vaguement fantastique. On pense alors à Black Sabbath, mais aussi aux premiers Judas Priest, ainsi qu’à The Who et Alice Cooper. Ce mélange raffiné donne une saveur toute particulière à ce premier opus qui propose, de plus, des chansons de grande qualité.

Débutant par une introduction inquiétante, héritée des films d’horreur des années 1950/1960, « Night Of The Demon » nous accueille dans ce heavy metal léché, dominé par un refrain fédérateur et des arrangements de guitares envoûtants. Immédiatement ce titre fait mouche et conduit le fan à poursuivre son écoute avec le groovy « Into the Nightmare » sur lequel la basse se taille la part du lion. Une nouvelle fois, le refrain est soigné, comme les lignes vocales. Demon se révèle être un groupe plus fin que ne le laisserait penser la pochette de cet album. Le groupe prend, en effet, un grand soin à nous proposer des compositions qui tiennent la route. Ainsi, « Ride The Wind » est un rock proche de The Who, avec un riff bourré de groove, et un refrain qui donne envie de chanter. Le single « Liar » nous emporte dans sa gigue infernale, porté par un beau riff appuyé sur une section rythmique pleine de feeling. Plus inquiétant, « One Helluva Night » est un pur titre heavy metal, appuyé sur un riff implacable qui donne envie de secouer la tête en cadence. Immédiatement addictif, ce morceau clôt l’album avec bonheur.

Avant cela, plusieurs chansons nous ont accroché l’oreille. « Father Of Time », avec ses touches progressives évoquant Blue Öyster Cult et certains morceaux de Judas Priest, nous surprend par sa justesse, tandis que l’enjouée « Decisions » lorgne du côté du hard FM avec ses arrangements et ses chœurs. Très éloignée de ce que proposait les groupes anglais de l’époque, elle montre toute l’étendue du talent de Demon. La ballade « Fool to Play the Hard Way » s’inscrit dans cette même voie, grâce à un refrain typé années 1970 et ses guitares veloutées. On se rend compte alors que Mal Spooner est un guitariste au toucher fin. Plus rock, « Big Love » s’éloigne de l’atmosphère horrifique pour proposer un titre teinté de blues, dans la lignée du southern rock de l’époque.

Premier album d’un groupe important de cette vague anglaise, Night of the Demon est un chef-d’œuvre qui n’est pas reconnu à sa juste valeur.

  • 1. Full Moon
  • 2. Night of the Demon
  • 3. Into the Nightmare
  • 4. Father of Time
  • 5. Decisions
  • 6. Liar
  • 7. Big Love
  • 8. Ride the Wind
  • 9. Fool to Play the Hard Way
  • 10. One Helluva Night
  • Dave Hill – Chant
  • Mal Spooner – Guitares  
  • Les Hunt – Basse, guitares
  • Chris Ellis – Basse
  • John Wright – Batterie

Label : Carrere

LOUDNESS – Live-Loud-Alive Loudness in Tokyo (1983)

Après un troisième album qui trouve son public, et plusieurs singles qui entrent dans les charts, Loudness investit le Nakano Sun Plaza de Tokyo le 24 septembre 1983 pour y enregistrer ce double album live. A noter que la VHS portant le même nom, mais avec des titres un peu différents, est enregistrée au Shibuya Kōkaidō, de Tōkyō le 2 novembre 1983. Dès le titre d’ouverture, le ton est donné : ce concert va faire la part belle aux morceaux du dernier album en titre, The Law Of Devil’s Land, avec pas moins de cinq extraits (« In the Mirror », « Black Wall », « Mr. Yes Man », « Sleepless Night » et « Speed »), mais aussi des singles inédits sur album (« Road Racer », « Shinkiro », « Burning Love »), et deux nouveaux titres uniquement présents sur ce live (« I Was The Sun », « Fly Away »). Autre surprise, la reprise de « Tusk Of Jaguar » extrait de l’album solo d’Akira. Seul le titre « Loudness » est sauvé des deux premiers albums. On comprend donc le changement d’orientation du groupe.

Dès « In the Mirror », on sent le groupe en forme. Le son est énorme, le rythme est accéléré par rapport à la version studio et le public est déchaîné. Akira, au sommet de sa forme, dévale son manche avec dextérité, tandis que la section rythmique écrase tout sur son passage. Quant à Minoru Niihara, malgré quelques imperfections, il s’acquitte de sa tâche avec efficacité. C’est d’ailleurs lui qui mène la danse sur « Road Racer », un titre percutant, au rythme saccadé qui aurait mérité d’atterrir sur un album studio. Mais le marché japonais est ainsi fait qu’il dévore les singles. Après une telle entrée en matière surprenante, mais ô combien efficace, Loudness nous livre deux inédits. Tout d’abord l’écrasant « I Was the Sun » que n’aurait pas renié Black Sabbath, puis « Fly Away », un morceau subtil, qui calme le rythme et qui ne tient que grâce à un refrain intéressant et au solo d’Akira. On peut s’étonner du choix de ces deux titres qui n’apparaîtront jamais ailleurs. Mais les Japonais sont friands de ce genre de manœuvre.

Après ces inédits qui, il faut le reconnaître, ont fait baisser le niveau, survient « Black Wall » dont la puissance et l’efficacité se révèlent sur ce double album. En entendant l’énergie déployée par les musiciens, on saisit aisément le caractère indispensable de ce titre. Il en va de même pour l’hymne « Loudness » rallongé et accéléré pour ce concert et qui apparaît comme un plébiscite du groupe à en croire l’hystérie du public. Il en sera de même pour le monstrueux « Speed » qui voit Munetaka Higuchi marteler ses fûts comme il l’a déjà fait sur son solo de batterie. Le son est épais, le rythme soutenu, et Minoru se prend pour Klaus Meine. Même « Sleepless Night » bénéficie d’un relooking heavy, en étant proposé sous une forme plus rapide et plus lourde, ce qui permet d’emporter l’adhésion d’un public que l’on entend hurler en chœur avec le groupe.

Pour alléger également l’atmosphère, Loudness propose aussi une superbe version de « Mr Yes Man » qui permet aux musiciens de prouver qu’ils savent aussi se montrer subtils sur scène. Hymne aux guitares heavy, comme le prouvent les instrumentaux « Tusk Of Jaguar »’et « Exploder », l’album se termine sur le magnifique « Shinkiro », sorti en single juste après l’album The Law Of Devil’s Land et sur le rapide « Burning Love » qui surprend le fan européen qui ne connaît pas ces titres, pourtant indispensables.

Ce Live-Loud-Alive est un album indispensable, à la fois parce que c’est le premier témoignage live de Loudness, mais aussi parce qu’il contient des titres rares ou inédits.

  • 1. Opening Theme (Mars, the Bringer of War) 
  • 2. In the Mirror 
  • 3. Road Racer 
  • 4. I Was the Sun 
  • 5. Fly Away 
  • 6. Black Wall 
  • 7. Tusk of Jaguar~Drum Solo 
  • 8. Mr. Yes Man
  • 9. Exploder~Heavenward 
  • 10. Loudness 
  • 11. Sleepless Night
  • 12. Speed 
  • 13. Shinkirō 
  • 14. Burning Love~Ending Theme (Theme of Loudness II) 
  • Minoru Niihara – Chant
  • Akira Takasaki – Guitares   
  • Masayoshi Yamashita – Basse   
  • Munetaka Higuchi – Batterie

Label : Nippon Columbia

LOUDNESS – The Law Of Devil’s Land (1983)

Après deux albums assez sombres, Loudness revient en 1983 avec l’excellent The Law Of Devil’s Land qui marque un premier tournant dans la carrière du groupe. Bénéficiant d’une production plus en accord avec le statut du groupe et qui va, enfin, mettre en valeur toutes les subtilités de son metal, ce nouvel opus s’ouvre sur « Theme of Loudness Part II », un court morceau d’ambiance qui donne le ton à l’ensemble. On sent alors les Japonais prêts à déferler sur le monde, et ce n’est pas l’enchaînement « In the Mirror », « Show Me the Way » qui va me démentir. S’appuyant sur un rythme rapide « In the Mirror » déboule tous riffs dehors, en nous offrant l’un des meilleurs titres de cet album et un hymne imparable qui montrera toute sa puissance en concert. Sans ralentir le rythme, « Show Me the Way » se révèle pourtant plus insidieux, avec son refrain facile à retenir, ses cavalcades et cette section rythmique efficace. Certes, l’anglais approximatif de Minoru Niihara peut surprendre, mais c’est aussi ce qui fait le charme de ce morceau.

Après cette impressionnante entrée en matière, le groupe ralentit l’allure avec « I Wish You Were Here » qui lorgne du côté de Kiss époque Dynasty en y injectant une bonne dose de metal brûlant. Sans doute le plus américain des titres de cet album. Vient ensuite l’étrange ballade « Mr Yes Man », une ode toute japonaise qui nous entraîne dans un univers parfois dissonant, souvent envoûtant, mais toujours juste, aux influences orientales et seventies. Avec ces deux morceaux s’amorce une autre mue du groupe qui se concrétisera sur Disillusion. Comme à son habitude, Akira nous délivre un solo d’une grande majesté.

La face B débute par le titre éponyme, un heavy speed dominé par une guitare furieuse et une basse vrombissante qui emportent l’auditeur dans son univers sombre jusqu’à un refrain imparable. Surfant sur la vague sataniste, à laquelle les musiciens ne croient pas, Loudness nous offre un nouveau titre de grande classe qui ne sera, pourtant, que très peu joué en concert, au contraire de « Black Wall » la pépite suivante. Ce heavy metal tourmenté se révèle, en effet, un hymne entêtant, grâce à ses lignes vocales déclamées, sa basse omniprésente et ses riffs uniques qui permettent ensuite l’envol de solos originaux.

Les deux derniers morceaux, bien différents l’un de l’autre, finissent néanmoins cet opus en beauté. « Sleepless Night » apparaît comme une réponse au heavy américain avec son riff lourd, son rythme médium et appuyé qui donne envie de secouer la tête en cadence, ses lignes de chant hurlées et ses chœurs masculins. Ce morceau méconnu est pourtant riche en arrangements subtils, comme le montre son solo et ses relances. Enfin, comme son nom l’indique, « Speed » accélère le rythme en descendant le poids du métronome au plus bas, tout en s’appuyant sur une batterie saccadée et une voix hallucinée.

En 43 minutes, Loudness accouche d’une œuvre majeure qui va les propulser en haut des charts de leur pays, mais aussi les faire connaître en Occident.

  • 1. Theme of Loudness Part II (ラウドネス讃歌) 
  • 2. In the Mirror 
  • 3. Show Me the Way 
  • 4. I Wish You Were Here 
  • 5. Mr. Yes Man 
  • 6. The Law of Devil’s Land (魔界典章) 
  • 7. Black Wall
  • 8. Sleepless Night
  • 9. Speed 
  • Minoru Niihara – Chant
  • Akira Takasaki – Guitares    
  • Masayoshi Yamashita – Basse   
  • Munetaka Higuchi – Batterie

Label : Nippon Columbia

SATAN JOKERS – Trop fou pour toi (1984)

Un an après Les Fils du metal, Satan Jokers revient avec un album ambitieux, riche, complexe, qui mêle metal, rock, éléments progressifs et même des tonalités FM sur certains morceaux. Trente-cinq ans après, ce foisonnement en fait un album exceptionnel, mais il fut loin d’être perçu de cette manière à l’époque. Certains fans ne saisirent pas les intentions du groupe, d’autres crièrent à la trahison en percevant les influences de la variété française sur une chanson comme « Infidèle », tandis que le partage du chant entre Pierre et Renaud échappa à la plupart. Les ventes ne suivirent pas et certains médias extrémistes lâchèrent même le groupe. A leur décharge, il faut avouer que personne n’avait encore entendu ça en France, et que le public, dans l’ensemble assez jeune, ne possédait pas les connaissances suffisantes pour appréhender tout cela.

Pourtant, le groupe avait prévu de satisfaire un grand nombre de fans en leur proposant notamment des titres heavy, comme le rapide « (Bienvenue Au) Sabbat », dominé par une basse énorme et dont les changements de rythmes passent en revue tous les motifs du metal. Dans un registre plus groovy, « Envie de Toi » pulse un mélange de metal et de funk, dans une explosion de bonne humeur qui évoque Mother’s Finest. On n’est pas loin non plus de ce que Jeff Scott Soto proposera vingt ans plus tard ou de ce que Trapeze avait pu produire. Evidemment, cet écart surprend, d’autant plus lorsque Satan Jokers invente le metal progressif sur son titre « La Marche Hérétique », en mêlant à son heavy des influences venues de Rush. C’est brillant, sans doute trop pour le milieu des années 1980. Pourtant, chaque composition se tient. Le pesant « Adrien » aux paroles démentielles nous entraîne dans un univers de folie qui éclaire davantage le titre de l’album.

Très différente de tout cela, « Trop Fou pour Toi », la chanson éponyme, s’éloigne du metal pour naviguer sur les rives de la variété et du rock, le tout soutenu par des claviers et des chœurs plus FM que metal. Ce ne sont pas les seules incursions aux limites du hard rock. « Infidèle » est un morceau d’AOR de grande qualité, porté par des lignes mélodiques soignées, alors que « Par Habitude » doit autant aux crooners qu’à la soul, avec des arrangements de voix jamais entendus dans la musique française. Nous ne sommes plus dans le metal, mais bien dans le rock. Il n’en demeure pas moins que cet album renferme de belles chansons, comme l’ouverture « Pas Fréquentables » au riff énorme et sautillant, qui nous prouve que Stéphane Bonneau était sans doute l’un des guitaristes les plus inventifs de l’époque. Même « Vices Privés », certainement l’une des compositions les plus absconses contient de superbes parties, faisant de cet album l’un des plus incompris du rock, ce qui est bien dommage.

  • 1. Pas Fréquentables
  • 2. (Bienvenue Au) Sabbat
  • 3. Adrien
  • 4. Infidèle
  • 5. La Marche Hérétique
  • 6. Trop Fou pour Toi
  • 7. Par Habitude
  • 8. Vices Privés
  • 9. Envie de Toi
  • Pierre Guiraud – Chant
  • Renaud Hantson – Batterie, chant
  • Stéphane Bonneau – Guitare
  • Laurent Bernat – Basse

Label : Vertigo

LOUDNESS – The Birthday Eve (1981)

Formé en 1981 sur les cendres de Lazy, auquel appartenaient déjà Akira Takasaki, Masayoshi Yamashita et Munetaka Higuchi, Loudness ne perd pas de temps pour enregistrer son premier album dès l’arrivée du chanteur Minoru Niihara. En quarante minutes d’un heavy épais, qui montre déjà un groupe soudé, The Birthday Eve propulse immédiatement Loudness dans le peloton de tête des groupes japonais. En effet, cette première réalisation montre déjà toute l’étendue du talent de ces musiciens techniquement doués et capables d’écrire des hymnes que reprendra en chœur le public nippon.

Ainsi, dès la profession de foi « Loudness », l’auditeur comprend qu’il va être pris à la gorge et ne plus être lâché jusqu’à la fin du disque. La guitare incisive d’Akira tisse des riffs meurtriers avant de s’envoler lors de solos majestueux. Toujours joué, ce titre est imparable et prend d’ailleurs davantage d’ampleur en concert. Autre hymne, « Rock Shock (More And More) », qui clôt cet opus, déferle tel un torrent furieux et emporte tout sur son passage, en faisant la part belle aux guitares. Il deviendra l’une des pierres angulaires des concerts du groupe.

Ce metal épais teinte également le sombre « Street Woman » aux lignes vocales torturées qui s’appuient sur des rythmes complexes et angoissants. La section rythmique s’y montre étincelante, aussi bien lors des couplets que du break jazz metal. Encore à la recherche d’un style propre, Loudness explore différentes voies, comme le speed metal sur « I’m On Fire » qui voit Minoru pousser des hurlements afin d’impulser davantage de puissance encore à ce titre supporté par une énorme section rythmique.

Sur « High Try », Loudness mêle différentes influences qui vont de Led Zeppelin au jazz rock, en passant par Black Sabbath, pour nous offrir un melting pot étonnant aux ambiances changeantes. Le son, un peu sourd, ajoute un côté malsain à l’ensemble. Plus étonnant encore, « To Be Demon » joue avec nos nerfs en changeant plusieurs fois de rythmes pour nous emmener dans un hard rock à la fois groovy et progressif avant de finir en cavalcade.On se dit alors qu’après une telle inventivité, Loudness est promis à un bel avenir, surtout qu’il est capable de composer des chansons plus abordables comme l’envoûtante « Open Your Eyes » qui permet à Akira de prouver une fois de plus tout son talent ou l’entraînante « Sexy Woman », aux riffs originaux et au refrain entêtant.

Avec ce premier album, inégal et à la production assez moyenne, Loudness montre néanmoins toutes ses qualités et attire l’oreille des amateurs de metal.

  • 1. Loudness
  • 2. Sexy Woman
  • 3. Open Your Eyes
  • 4. Street Woman
  • 5. To Be Demon 
  • 6. I’m on Fire 
  • 7. High Try 
  • 8. Rock Shock (More and More) 
  • Minoru Niihara – Chant
  • Akira Takasaki – Guitares    
  • Masayoshi Yamashita – Basse   
  • Munetaka Higuchi – Batterie

Label : Nippon Columbia

ROSS THE BOSS – Born Of Fire (2020)

Après un très bon By Blood Sworn (2018), n’en déplaise à certains pisse-froids, Ross The Boss revient avec un nouvel album épais comme du Holy Mother, moderne comme du Unleash The Archer, destructeur comme du Judas Priest et inventif comme les premiers Manowar. Epaulé par des musiciens de grand talent, le guitariste nous livre un quatrième opus au son énorme et aux riffs ingénieux, qui ne comporte aucun temps mort et qui pousse le heavy metal dans ses derniers retranchements. Le chant de Marc Lopes est tranchant, furieux et suffisamment modulable pour s’adapter à toutes les ambiances. Cela permet de propulser chaque titre vers des sommets, tandis que la section rythmique assure une assise impeccable, ce qui n’est pas étonnant avec la présence d’un bassiste comme Mike LePond (Symphony X).

Débutant par le monstrueux « Glory To The Slain » qui donne le ton, ce nouvel album nous prend à la gorge dès ses premières mesures. Les riffs de ce speed metal évoquent un croisement entre Holy Mother et Judas Priest, ce qui est également le cas du belliqueux « I Am The Sword » sur lequel le chant agressif de Marc Lopes fait de cette chanson un vrai hymne metal. Les solos et les arrangements de guitares sont à la fois subtils et acérés. C’est également le cas sur « Denied By The Cross » qui mêle rythme syncopé et refrain carré à hurler en cœur. Plus épique, avec ses couplets qui donnent envie de secouer la tête en cadence, « Godkiller » est un superbe morceau qui flirte avec le metal extrême, alors que « Waking The Moon » se construit sur un rythme lancinant qui vient supporter des lignes vocales tantôt déclamées, tantôt hurlées, tantôt chantées. Original, cette composition s’inscrit dans le metal moderne, sans oublier de puiser aux origines du genre, pour mieux nous entraîner dans un univers riche et coloré.

L’adjectif riche convient d’ailleurs parfaitement à cet album qui varie ses ambiances. « Fight The Fight » est ainsi un mid-tempo nuancé dont le refrain est destiné à être chanté lors des concerts. Tout aussi fédérateur, l’excellent « Maiden of Shadows » aux influences celtiques nous prend aux tripes, tout en nous donnant envie de secouer la tête en cadence. Portée par des riffs puissants et mélodiques, cette chanson bénéficie également d’un beau refrain étayé par des chœurs. Du grand art. Plus attendu, mais tout aussi efficace, « Shotgun Evolution » est teinté de touches orientales du plus bel effet, nous prouvant une fois de plus que Ross The Boss est un brillant compositeur, mais également que Steve Bolognese est un batteur diablement efficace.

Le reste de l’album nous conduit vers des sentes un peu différentes, avec l’ingénieux « Born Of Fire », dont le refrain mélodique tranche avec la rythmique thrash et les envolées de guitares. Dans un registre assez proche, « Demon Holiday » est un titre sans doute moins indispensable que les autres, en dépit de couplets très mélodiques. Plus sombre, le lent « The Blackest Heart » nous ramène par certains côtés à Black Sabbath, allégeant la dernière partie de l’album, avant que la chevauchée « Undying » ne relance la machine grâce à un rythme sautillant et un chant d’écorché vif.

Born Of Fire est un excellent album qui contient plusieurs chansons déjà incontournables et qui concourt déjà pour le top 20 de cette année 2020.

  • 1. Glory To The Slain
  • 2. Fight The Fight
  • 3. Denied By The Cross
  • 4. Maiden of Shadows
  • 5. I Am The Sword
  • 6. Shotgun Evolution
  • 7. Born Of Fire
  • 8. Godkiller
  • 9. The Blackest Heart
  • 10. Demon Holiday
  • 11. Undying
  • 12. Waking The Moon
  • Ross the Boss – Guitares, claviers
  • Mike LePond – Basse  
  • Marc Lopes – Chant, claviers
  • Steve Bolognese – Batterie

Label : AFM

MOLLY HATCHET – The Deed Is Done (1984)

Après le très hard rock No Guts No Glory, Molly Hatchet prend un virage à quatre-vingt-dix degrés pour se lancer dans un southern rock FM, à la manière de ce que propose déjà 38 Special ou, dans un genre voisin ZZ Top. Cette double parenté est évidente par l’incorporation du claviériste John Galvin à la place du guitariste Steve Holland et par le son composé par Terry Manning. En effet, les guitares sonnent presque comme du ZZ Top époque Eliminator comme sur « Satisfied Man » ou « Good Smoke and Whiskey » que le son des guitares, trop léger, dessert un peu, tandis que les claviers enrobent l’ensemble dans une sorte de guimauve parfois fadasse : le catastrophique « Man On The Run ».

Le fan de la première heure prend donc cet album en plein tronche sans vraiment comprendre ce qui lui arrive, surtout que certains titres sont carrément médiocres, comme « Backstabber » qui sonne comme un sous-produit FM ou la guimauve « Stone in Your Heart » avec son refrain gorgé jusqu’à la gueule de « na na na na na »… On nage en plein délire. Il faut dire que le groupe a peu écrit et que la plupart de ces morceaux ont été amenés par des compositeurs extérieurs comme Tom DeLuca qui a écrit pour Aldo Nova. Autant dire que ces chansons n’avaient rien à faire sur un album de Molly Hatchet et que tout cela a été téléguidé par la maison de disque.

Que peut-on sauver de ce naufrage ? Le morceau d’ouverture « Satisfied Man » est certainement l’un des moins mauvais titres de ce disque et aurait pu donner le « la » en proposant une vraie alternative à ZZ Top, comme c’est le cas avec le bon « Straighshooter » qui est signé par l’ensemble du groupe et qui se démarque totalement de la mélasse FM déversée ailleurs. « She Does She Does » est également un titre correct, aux racines southern rock encore décelables, ce qui n’est pas le cas sur la plupart des morceaux. Ses apports de saxophones renvoient à Foreigner, tandis que la son des guitares évoque ZZ Top. Notons aussi une agréable reprise du « Heartbreak Radio » de Frankie Miller dans un esprit rock et celle du « I Ain’t Got You » de Calvin Carter déjà immortalisée par The Yardbirds, Blue Öyster Cult, Aerosmith ou The Animals. Mais lorsqu’on commence à souligner que les meilleurs morceaux d’un album sont ses reprises, on sait qu’on a touché le fond…

  • 1. Satisfied Man
  • 2. Backstabber
  • 3. She Does She Does
  • 4. Intro Piece
  • 5. Stone in Your Heart
  • 6. Man on the Run
  • 7. Good Smoke and Whiskey
  • 8. Heartbreak Radio
  • 9. I Ain’t Got You
  • 10. Straight Shooter
  • 11. Song for the Children
  • Danny Joe Brown – Chant   
  • Dave Hlubek – Guitares
  • Duane Roland – Guitares
  • Riff West – Basse
  • John Galvin – Claviers
  • Bruce Crump : Batterie

Label : Epic

Producteur : Terry Manning

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